Aujourd’hui j’ai trente-cinq ans.
Je suis né le douze août 1970. J’aime bien cette date. J’ai commencé à me faire à ce nouvel âge il y a quelques mois de cela. Je suis triste. J’ai vieilli trop vite. Je suis pourtant encore jeune. Cependant, j’ai l’impression d’être un vieux qui n’a pas vu passer sa vie et qui la regarde avec tristesse. Pourquoi suis-je dans un tel état ? Je me pose la question depuis des jours, ou plutôt des nuits. Le sommeil est difficile à venir.
J’ai souvent du mal à m’endormir. Je pense à la mort de mes proches. Je pense surtout à celle de ma grand-mère. Je panique à l’idée de la perdre. Je verse parfois une larme avant de dormir. Ces derniers jours, je ne pense qu’à ma propre mort. C’est ridicule. J’ai peur. Je ne pense qu’à moi et suis égoïste. J’ai l’impression que ma vie défile comme l’eau passe entre des mains. Je ne contrôle rien et pense plus au passé qu’à l’avenir.
Trente-cinq ans, c’est l’heure du premier bilan. Qu’ai-je fait de ma vie ? Le problème vient peut-être de cela. D’autres peuvent s’enorgueillir d’avoir pu bâtir quelque chose de concret à mon âge. Ce n’est pas mon cas. Pas de maison, pas d’enfant, pas de chien.
Heureusement l’entourage réconforte. Trente-cinq ans, mon Dieu, ce n’est pas possible. Tu ne fais vraiment pas 35 ans. Tu es en bonne santé. Tu vis depuis treize ans avec une personne que tu aimes et qui t’aime. Tu as des amis qui tiennent à toi. Tu as fait de (trop) longues et belles études. Ton travail est fantastique. Oui c’est vrai. Mais le propre de l’être humain n’est-il pas d’en vouloir toujours plus ?
Je ne travaille jamais le douze août. C’est ma journée. Il y a quelques années, Moustic et moi-même fêtions en commun notre anniversaire. Nous attendions avec impatience la surprise préparée par le reste de la bande. Ce n’est plus le cas depuis quatre ou cinq ans. Certaines années, cette journée est mélancolique. D’autres fois elle est joyeuse. Elle est parfois triste.
Aujourd’hui, rien de tout cela. La journée fut normale, et c’est bien comme cela. J’ai passé mon après-midi dans le triangle maudit pour carte de crédit. Rue du bac. Bon Marché, Grande Epicerie, Maison du Chocolat, Nespresso et Paul Smith. J’ai été très raisonnable.
Snooze a passé la journée de son côté. Lui non plus n’a pas travaillé. J’ai eu un joli cadeau le soir en rentrant. Tous mes amis et proches ont pensé à moi. Coups de téléphone, emails et SMS se sont succédés. Cela me fait énormément plaisir.