Mon amitié avec Jérôme revient de loin. Snooze s’était une nouvelle fois lié avec un connard fini à la faculté de pharmacie. Je sortais avec lui depuis quelques années et il venait d’annoncer son homosexualité à nos amis proches. Jérôme venait de rentrer dans son cercle d’amis et il ne m’aimait pas car il souhaitait avoir une relation presque exclusive avec Snooze. De mon côté, je ne l’aimais pas non plus car il collait d’un peu trop près mon doudou. J’ai même pensé un moment qu’il y avait hippopotame sous caillou, mais j’ai vite découvert que plus hétérosexuel que Jérôme, cela n’existait pas. Le clash s’est vite produit. Nous nous sommes mis sur la gueule et ne nous sommes pas parlés pendant plus de quatre ans.
La situation était donc très compliquée à gérer pour mon cher et tendre. Son mari ne supportait pas l’un de ses meilleurs amis et il devait donc se débrouiller pour le voir sans moi. Mais il n’a jamais renoncé à nous réconcilier. Ce fut chose faite le jour ou j’ai déménagé pour m’installer boulevard de Picpus. Nous l’avions rencontré par hasard (j’étais bien naïf à l’époque, Snooze one point) et il m’avait généreusement proposé de m’aider à porter les cartons. Nous avons fini la soirée au restaurant avec sa copine de l’époque. C’était assez amusant. Nous avions plein de choses en commun et nous étions même inscrits, sans même le savoir, en DESS d’économie. Je souhaitais alors quitter le monde impitoyable de la recherche, il ne souhaitait plus être pharmacien d’officine. Pendant les années qui suivirent, nous avons tout d’abord appris à nous connaître puis petit à petit à nous aimer. J’ai vite compris qu’il avait un coeur gros comme ça, et que, peut-être un peu comme moi, il avait envie qu’on le serre très fort et qu’on lui dise je t’aime mon ami. Mais il y avait une deuxième couche: sa copine Maud. Elle n’aimait rien ni personne et était aussi désirable que Gargamel. Maud était également frigide et les deux tourtereaux n’avaient pas fait de joyeuse galipette depuis de longues années. Maud était une vraie garce et inhibait complètement Jérôme qui commençait vraiment à être chaud comme de la braise.
Le problème était plus profond. Ils ne pouvaient pas vivre ensemble sans se crier dessus mais ne pouvaient pas vivre longtemps séparés. Après de multiples chamailleries, ils ont finalement décidé de se marier. Jérôme a pris peur et a annulé le mariage une semaine avant la date. Maud a balancé ses affaires du quatrième étage par la fenêtre et Jérôme a débarqué à la maison (alors que nous vivions à l’époque dans 29 petits mètres carrés). La promiscuité à failli être fatale à mon couple. J’ai vite fait mes valises et ai déménagé temporairement chez ma mère qui était ravie de voir revenir à la maison son ingrat de fils. Jérôme et Maud ont fini par se réconcilier et ont annoncé une nouvelle fois leur mariage. Jérôme nous a demandé d’être ses deux témoins. J’ai refusé car je ne pouvais pas cautionner une telle union. Je n’aimais pas Maud et elle me le rendait bien. Le mariage a finalement eu lieu. Six mois plus tard, Maud a tenté de poignarder Jérôme et Jérôme a tenté d’étrangler sa tendre épouse. Il dormait enfermé dans le bureau de leur appartement car il avait peur qu’elle ne le zigouille pendant son sommeil. Il était vraiment urgent qu’ils se séparent. C’était une question de vie ou de mort.
Mon petit Jérôme a difficilement tiré un trait sur le passé. Il a finalement trouvé un magnifique appartement, s’est plongé dans le travail et s’est petit à petit reconstruit. Il a surtout rencontré la belle Alice. Ils se sont mariés samedi dernier. J’ai accepté avec grande joie d’être son témoin.
Toute la petite bande d’amis s’était donné rendez-vous devant la mairie de Neuilly. Alexandre, Caroline, petit Jean, Carole et Catherine étaient déjà arrivés. Je m’étais acheté une jolie chemise blanche pour l’occasion, chemise ruinée par une tâche de café quelques secondes avant de quitter notre appartement. J’avais heureusement un plan B et une autre chemise de sauvegarde. Même une troisième. C’est en Nonomobile que nous nous sommes rendus en terres Sarkoziennes. Juste en sortant de la voiture, je me suis aperçu que j’avais une immonde trace de pâtée pour chat sur la poche de mon costume. Mon dieu, je m’étais transformé en Jean-Louis Borloo. Jérôme avait choisi une petite souillon comme témoin. J’ai donc gardé la main gauche collée à ma veste pendant plus d’une heure. Improvisation et dignité étaient mes nouveaux prénoms. Indécence était le nom de la bague offerte à la mariée. Je n’avais jamais vu un diamant aussi énorme. C’était énorme. Enorme.
J’ai fini par faire un caca nerveux à Snooze. Nous devions passer par la maison avant de nous rendre au dîner. Tout comme les étoiles du festival de Connes, je devais changer de tenue, et accessoirement porter un costume sans tache.
Jérôme et Alice avaient loué le château des Condé à Vallery, au nord de la Bourgogne. Nous avons rejoint le reste de la troupe en fin d’après-midi. Le lieu était superbe. Certainement le mariage le plus bourgeois et raffiné auquel j’avais eu la chance d’assister. Juste avant de participer aux photos officielles, j’ai réussi à flinguer ma cravate avec une mousseline de choux-fleur et son émulsion de foie gras. J’allais être catégorisé gros dégueulasse et définitivement être privé de mariage pour les dix prochaines années.
Conseil de tonton roidetrefle: Toujours avoir un plan C et surtout une chemise et une cravate de rechange lorsque l’on accepte d’être témoin.
Après un cockail, une visite des un plan caves et un dîner quatre étoiles, Jérôme et Alice avaient même organisé un superbe feu d’artifice dans les jardins du château.
Je crois définitivement que j’ai misé sur le mauvais cheval. :dunce_tb:
C’est Jérôme que j’aurais dû draguer, pas Snooze.
Moi aussi je veux me marier dans un joli château dans une robe de princesse, un grand feu d’artifice et une pièce montée qui touche le plafond.
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