Le jour ou j’ai taillé un short

Enfourcher mon vélo tous les matins me permet à la fois de me passer des services de la régie autonome des transports parisiens et de pratiquer une activité sportive régulière. Qu’il vente, pleuve ou neige, je n’hésite jamais une seule seconde. Je connais le parcours par cœur et tente ainsi d’éviter quotidiennement tout incident : ouverture rapide de porte, sortie de voiture, piéton imprudent ou animal de compagnie. J’ai déjà été l’innocente victime de piétons et me suis retrouvé à plusieurs reprises le cul à terre, pantalon déchiré, coude ou paume ensanglanté(es). Même en respectant scrupuleusement le code de la route, il est par définition impossible de gérer l’imprévu : alcooliques titubants sur une piste cyclable, nuisibles divers et variés qui tentent de faire tomber les cyclistes en donnant des coups de pieds dans les roues ou en projetant au dernier moment une poubelle face au vélo, mères de famille qui pensent que les pistes sont uniquement réservées aux poussettes, ou enfin autres cyclistes qui empruntent une piste à sens inverse.

Il faut reconnaitre que le nombre de cyclistes crétins est considérable. La grande majorité ne respecte pas les feux de signalisation et plus généralement les consignes de sécurité les plus élémentaires. J’adore particulièrement croiser les cyclistes vêtus d’un gilet couleur éboueur, d’un casque de compétition et de brassards clignotant qui font bip bip, cyclistes roulant à deux à l’heure, mais qui jouissent littéralement en grillant feu(x) sur feu(x). Ces individus ne font que polluer les pistes et donnent une image assez dégueulasse des amateurs de deux roues. Le cycliste passe ainsi systématiquement pour un gros bourrin responsable de l’intégralité des maux parisiens, de la faim en Afrique, de l’apparition de polypes au cul ou du séisme haïtien.

(Warning: paragraphe non politiquement correct un peu haineux) Essayer de faire comprendre à une connasse à landau que sa place est uniquement sur le trottoir et qu’il ne lui viendrait jamais à l’idée de marcher avec sa progéniture au beau milieu de la route entre voitures, motos et bus relève du fantasme. A la base, vous êtes un con de cycliste. Si en plus vous vous affichez en tant que pédé, vous êtes un con de cycliste qui n’aime pas les enfants. Même chose pour les papichoux à déambulateur(s) ou certaines personnes handicapées. Même en klaxonnant, ces individus ne dévient généralement pas d’un iota car elles pensent être prioritaires dans toutes les situations, et se tamponnent allègrement le coquillard de constituer un danger, à la fois pour tout cycliste, mais également pour elles-mêmes.

Samedi dernier, j’ai pour la première fois taillé un short à une vilaine mamie moustachue de très très mauvaise foi. Sortant à toute berzingue d’une boulangerie et traversant hors passage cloutés la rue Montmartre sans prendre garde à la circulation, une femme d’un âge certain s’est retrouvée à quatre pattes à bouffer le bitume après avoir été fauchée par mon vélo. Cette personne était apparemment pressée et ne souhaitait pas mouiller son abondante chevelure choucroutée. Une petite camionnette étant stationnée devant la boulangerie, il m’était impossible de la voir traverser la chaussée, encore une fois en dehors des clous. Tout conducteur devant être maître de son véhicule, j’étais de facto responsable de l’accident. J’ai de mon coté réussi à ne pas tomber car je roulais lentement, mais mon vélo et les affaires déposées dans son panier se sont retrouvés au beau milieu de la chaussée.

Je suis vite passé pour un gros crétin et les insultes ont commencé à fuser. Jeune versus personne âgée, vélo versus piéton, le choix était vite fait. Les riverains se sont précipités sur l’innocente victime qui hurlait comme un cochon qu’on égorge. Comment avais-je pu renverser cette pauvre femme? Il ne servait à rien de dire que si j’étais bien responsable, je n’étais pas coupable et qu’il m’était impossible d’éviter l’accident. Tout le monde se moquait de savoir si j’allais bien et si mon vélo n’avait subi aucun dommage. L’accidentée me considérait comme un délinquant. Elle éructait aux passants sa peur de me voir m’enfuir sans avoir laissé mes coordonnées. Elle souffrait, elle avait mal (sans la moindre égratignure apparente) et me déversait des litres de fiel en pleine tronche. Oui oui oui, tout le quartier le savait.

J’ai finalement pu récupérer mon vélo et ai convaincu la méchante dame de l’accompagner jusqu’à la caserne voisine.

Trois superbes mâles sont alors sortis d’une jolie camionnette rouge. Ils marchaient au ralenti. J’entendais du Barry White. Ils sentaient bon le sable chaud. J’ai aidé les gentils pompiers à installer la victime sur un brancard. J’en ai profité pour plaider mon cas et ai proposé à trois reprises de laisser mes coordonnées. Personne n’en a voulu. Les hommes en rouge ont fait un premier bilan et ont conduit quelques minutes plus tard la vilaine chouineuse à l’hôpital pour réaliser une radiographie des genoux. De mon côté, je me retrouvais avec des livres trempés et cornés, un sac troué et le dérailleur endommagé. Je n’ai même pas pensé à prendre les coordonnées de la responsable de l’accident. Un peu couillon le roidetrefle. Tout cela pour rappeler que si j’avais conduit une voiture, la victime ne serait certainement plus vivante. J’aurais un mort sur la conscience et certainement de très gros problèmes avec la justice.

N’empêche, j’ai encore la haine. Fuck le karma. :blush2_tb:

22 commentaires sur “Le jour ou j’ai taillé un short

  1. si je dis « espèce de con de pd » et que les gens n’ont pas lu ton billet ils vont me prendre pour un homophobe.

    Oh. j’essaye :

    Espèce de con de pd qui n’aime pas les enfants et les mémés!

  2. Tu as sauvé une vie au contraire. La prochaine fois, la vieille rombière réfléchira à deux fois avant de traverser une rue. Fais gaffe quand même 😉

  3. En vrai chuis sur que tu aimes pas les vieilles dames, que tu la guettais et qu’à sa sortie tu as mis la pédale à fond pour l’écraser avec ton engin du diable. N’est ce pas ? :blink2_tb:

  4. ah mais j’aurais pu être cette victime, car vois-tu, les vélos ne faisant pas de bruit et moi-même étant fort distraite, j’ai tendance à ne pas me souvenir qu’à certains endroits de la ville, une partie du trottoir est réservée aux cyclistes…Allez vas-y, insulte moi, d’te façon je suis un peu sourde, je ne t’entendrai peut-être pas :clap_tb:

  5. Oh roidetrefle, que je connais ce genre de situation.
    Les vieux, les vieilles, les jeunes, les pressé(e)s, les lambinards, j’ai connu ça. Maintenant débouler de derrière un camion hors passage piéton relève de l’inconscience voire du suicide programmé ! :king_tb:
    Peace roidetrefle, peace !!

  6. Cycliste occasionnelle je respecte les cyclistes de façon systématique sauf lorsqu’ils s’obstinent à encombrer les rues volontairement étroite en boudant les jolies pistes cyclables pourtant absolument dégagées dans ma belle ville de province. Je compatis très sincèrement, à cet incident facheux et que je sais hautement contrariant.

  7. T’aurais été en voiture, alertée par le bruit et l’odeur, elle t’aurait peut-être entendu. Mais ça ne lui aurait pas arrangé le caractère, hélas.

    Enfin…

  8. Ma plus belle trouille en voiture a été le jour où je passais tranquillement un feu vert et où j’ai vu débouler sur ma droite un cycliste qui grillait le feu rouge à fond la caisse. J’ai pilé et mon coeur en palpite encore. Même pas eu la possibilité de klaxonner et de l’agonir d’insultes, il était déjà loin quand j’ai repris ma respiration.

    MAIS ! Tu nous dis que TOI tu respectes les feux, alors….. je veux bien te croire, mon biquet.

    Beaucoup aimé le passage des trois beaux mâles sortis de la cammionette rouge au ralenti sur fond de Barry White : ils n’ont pas voulu de tes coordonnées…? Pas de doute, la prochaine fois, pour pouvoir emballer les bogosses APRES, faut tuer la mamie AVANT. Rien de moins !

  9. Espèce d’ abruti!
    Pourquoi tu n as pas pris sescoordonnees a la vieille peau! On aurait pu faire des descentes tous les jours a guetter sa sortie d’ immeuble et offrir une prime a celui qui réussirait a la dégommer pour de bon !
    Petit joueur va !

  10. Rha roidetrefle, je t’ai déjà expliqué souvent, les trottoirs encombrés par les scooters garés, les poubelles, les voitures posées comme des merdes, sont impraticables avec une poussette – j’imagine même pas un gros fauteuil électrique.
    Bon, cette semaine, à Grenoble, ma rue étant somptueusement déneigée pour les voitures, mais pas pour les piétons, et ma poussette n’ayant pas de patins, j’ai carrément circulé sur la chaussée. En priant pour que personne ne nous écrabouille… :mad_tb:

  11. C’est curieux comme parfois on est coupable des torts des autres.
    Heureusement que tu n’étais pas en voiture, effectivement. Et que tu n’as rien eu. Il aurait plus manqué que ça !
    Le pire c’est que ça ne lui servira sans doute pas de leçon puisque bien dans ce qui lui fait officie de cervelle tu étais dans ton tort et elle de droit divin.

  12. Exercice de style : raconter la même chose, mais cette fois vue par la mémé…
    C’est marrant mais lorsque je suis piéton je trouve que les cyclistes sont des enfoirés, et réciproquement lorsque je chevauche mon destrier de métal tous les piétons sont des cons. Les joies de la relativité !

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