Cela fait bien longtemps que je ne parle plus de ma vie privée sur ce blog. Même si j’ai très peu abordé le sujet, il m’est arrivé de me livrer dans quelques rares billets, directement ou entre les lignes. Le temps passant, certains proches et autres connaissances ont trouvé l’adresse de ce blog, participant involontairement à un processus de castration rédactionnel, ou plus simplement d’autocensure naturelle. Il est ainsi souvent plus facile de parler de soi face à des inconnus. Qu’importe. Le but initial n’a jamais été de me lamenter sur mes problèmes existentiels et de sombrer dans le pathos. L’exercice est casse-gueule, assez chiant à lire et déprimant à la longue. Je préfère avant tout publier des billets positifs, amusant, le tout sans jamais mentir ou travestir la réalité. J’évite ainsi de parler politique, religion, de ma vraie vie privée, de mes amis, ou même de mon travail, même si le clavier me démange très souvent. D’autres le font bien mieux que moi.
Un sujet demeure toutefois récurent: l’absence de relation que j’entretiens avec mon père. Comme tous les enfants, j’ai souhaité avoir un père attentif, tendre, présent et aimant. Un vrai papa gâteau, un père qui aurait pu être présent pendant mon enfance et mon adolescence, un père qui aurait pu m’apprendre à me raser (c’est crétin, hein), qui aurait pu me dire que fumer, c’était mal, avec qui j’aurais pu avoir une activité sportive, parler des filles, être guidé dans ma vie estudiantine ou découvrir le monde. De la complicité bordel. Ce ne fut hélas pas le cas car mes parents se sont séparés quelques mois après ma naissance. Je l’ai compris tardivement et ai brusquement décidé de couper tout lien entre lui et moi voila une dizaine d’années. Squouik squouik (bruit des ciseaux).
Ne prenant jamais de mes nouvelles, mon père a toutefois commencé à s’interroger après trois ou quatre ans sur les raisons de mon silence. Il était temps. Le bougre a vaguement tenté de reprendre contact, mais je n’ai pas répondu à ses avances. Il était définitivement sorti de ma vie, je vivais très bien sans lui et n’éprouvais aucun besoin de le revoir. Mieux. J’étais véritablement libéré de ne plus avoir à lui rendre visite et à l’affronter. J’étais un nouveau roidetrefle et ma vie était belle comme cela. De son côté, il avait refait sa vie avec une femme qui ne m’appréciait guère, voyant en moi une trace indélébile de son passé. Le genre de trace toute verte qui colle sous la chaussure. Ma belle-mère était à sa disposition, et semblait parfaitement accepter sa nouvelle condition. Le couple avait fini par effacer toute marque de mon existence. Lorsque je séjournais dans leur maison, on me logeait dans l’une des chambres destinées aux invités. Je n’avais pas accès à toute la maison, certaines armoires étaient fermées à clef et le téléphone était parfois débranché. Je ne m’y rendais que par devoir filial. Il ne m’acceptait que par devoir paternel. Ambiance fête du slip façon Bourguignonne. J’étais alors très passif, pas forcement vrai dans la vraie vie.
Il y a quelques années, daddy a débarqué à la maison et est tombé sur un Snooze remonté qui lui a expliqué que je ne souhaitais plus le revoir et que j’aimais accessoirement la bite. Il est parti la queue entre les jambes en pleurant, et n’a plus jamais donné de nouvelle, jusqu’en juin dernier. Sa femme venait de mourir d’un cancer du sein. Il était seul, se sentait abandonné et n’avait plus comme option que de faire du chantage affectif à son ex-femme, son ex-belle-mère et son ex-fils. En grand expert, il a réussi à attendrir une partie de son ex-famille.
Je n’ai pas souhaité reprendre contact car je considère qu’il est définitivement sorti de ma vie. Quitte à passer pour le plus grand des salauds, je ne prends pas le risque de l’affronter. Je suis ainsi persuadé qu’il serait capable de me faire culpabiliser en retournant notre passif en sa faveur. Ma décision est sans doute lâche mais réfléchie. Certains de mes amis savent que je suis capable de couper définitivement les ponts avec mes proches. Pas toujours très sensible le roidetrefle. Enculé je suis, enculé je reste. Mais toujours droit dans mes bottes. Non mais.
La chose qui me troue le cul ces derniers temps est l’attitude de Snooze et de ma mère. La semaine dernière, j’ai reçu à mon ancienne adresse une lettre de mon géniteur. Il avait rendu visite à ma grand-mère en Corrèze et souhaitait une nouvelle fois reprendre contact. J’étais à Londres lorsque la lettre est arrivée. Ne connaissant pas l’expéditeur, j’ai naturellement demandé à mon cher et tendre de l’ouvrir. Je n’ai pas souhaité connaître son contenu, et ai demandé à Snooze de détruire la lettre.
Snooze n’a pas respecté mon souhait et m’a fait croire en bonus qu’il avait donné notre nouvelle adresse à mon père pour que je puisse m’expliquer avec lui (trop drôle le Snooze parfois). D’après mon chéri, je devais le revoir et l’affronter. Cette solution lui paraissait la meilleure pour moi. Après lui avoir demandé d’arrêter de jouer au psychothérapeute du pauvre et de se mêler de ses affaires, je lui ai malicieusement rappelé qui ferait mieux de régler certains comptes avec son père et son frère avant de me donner le moindre conseil pourri. Quelques minutes plus tard, ma mère me contactait à son tour par téléphone et me demandait à son tour de reprendre contact avec lui. Comment dit-on « lâchez moi la grappe » en français ?
Le point positif de l’histoire est mon moral d’acier: il en faut vraiment beaucoup pour me déstabiliser. Le point négatif est certainement l’énergie folle que je dépense à me contenir face à des proches que je pensais avoir à mes côtés, mais qui involontairement me savonnent la planche. Pas facile.
Mais le pire dans l’histoire, c’est qu’un gros bâtard m’a spoilé le résultat de la finale nationale d’ « un dîner presque parfait » en me donnant le nom du vainqueur.
Homophobiiiiiiiiiiie! :devil_tb:
Il y a des poubelles qu’il vaut mieux vider avec les concernés avant que le camion ne soit définitivement passé. Mais c’est toi qui vois et les conseilleurs toussa toussa…
C’est quoi « Un dîner presque parfait » ?
Ah ben là je dis qu’il n’y a que toi pour décider ou non de reprendre le contact. Mhmmmm ça ménerveraitunpeu qu’on me force la main moi !
C’est malheureusement le genre de refus -droit-dans-ses-bottes- qu’on finit toujours, un jour ou l’autre, par regretter plus ou moins… enfin moi, je dis ça je dis rien… :huh_tb: Ah si je dis une chose : life is short
je comprends que tu dépenses de l’énergie… Pas facile pour certaine personne de comprendre qu’on puisse s’être détaché d’un de ses géniteurs sans qu’ils s’en mêlent. Mon père est revenu vers ses filles quand sa compagne l’a éjecté, ma sœur ne comprend pas quand je lui dis que je n’ai plus d’affection pour lui. Ça me permet de le considérer en tant que ce qu’il est, avec ses défauts et ses qualités mais je n’ai aucunement besoin d’avoir des relations avec lui.
Puisque tu as pris ta décision, le moins que l’on devrait faire c’est de la respecter, je te comprends.
Et si tu as envie de changer d’avis, cela sera aussi ton problème, à toi. Et rien qu’à toi.
Entièrement d’accord avec toi.
Ton mari t’aime et n’a rien à voir dans cette histoire, cela mérite considération. Ses avis me paraissent dignes d’être pris en compte parce qu’ils viennent de la personne qui te connaît le mieux, tel que tu es et non tel que tu parais?
Ta mère est dans une position bien plus ambiguë : quels que soient les torts de son mari, elle l’a bien décapité de toutes les photos. Aujourd’hui, elle conseille de régler les affaires en souffrance, et comme de bien entendu, c’est toi qui dois faire le total de la soustraction et retrouver la tête coupée de l’autre con.
Fais ce qui te va le mieux. Il n’y a que des vérités provisoires.
Bisou.
c’est en effet parfois usant de devoir se contenir et faire bonne figure…
Hélas, lorsque l’on est quelqu’un de bien, il est dur de faire autrement…
On ne le nous passerait pas de toutes façon.
Ta décision ne fait de toi ni un salaud, ni un lâche, voyons. Et puis les conseilleurs, aussi proches soient-ils, ne seront jamais les payeurs.
Alors fais comme ça te semble bien pour toi (et par répercussion : pour eux, au passage…)
Bisous
Je trouve cette décision loin d’être lache. moi c’est avec ma grand-mère que j’ai coupé tous les ponts.
un ami m’a dit : l’arbre généalogique, des fois pour pas mourir, faut élaguer les branches malades…
cet « article » parle beaucoup de ton cul mais il n’ya aucune illustration. Bien dommage.
J’étais réservé à ton premier post sur ta position vis-à-vis de ton géniteur mais je te comprends mieux cette fois. En fait il ne s’est jamais occupé de toi puisque séparation quelques semaines après ta naissance, et tu ne lui dois rien je comprends parfaitement ta position et tu fais ce que tu penses être juste pour un bonhomme qui se retrouve seul au soir de sa vie mais l’a un peu cherché quand même!!
Bis repetita… Je dirai comme tous les autres. Je comprends que ça puisse être horripilant d’être harcelé par les proches qu’on aime pour revenir sur une décision difficile, et de plus, mûrie longuement seul, j’imagine. Au fond, tu as bien raison de le faire comme toi tu le sens.
Plus rigolo : toi aussi tu es fan de « Un dîner presque parfait » ?? J’adore. Mais la finale nationale, après en avoir vu 2 ou 3 épisodes, j’ai laissé tomber. Ca volait trop haut dans la compétition acharnée, à mon goût. Ca perd le côté ‘bon enfant’ de la semaine à 5 convives. Alors, ça m’ennuie. D’autant que le nom du gagnant (national), moi, je le sentais venir depuis le départ. De ce côté-là, ça m’a paru un poil bidonné…
Mon histoire avec mon « père » (géniteur conviendrait mieux) est ressemblante … J’ai pris la même décision que toi, il y a quelques années. Depuis il n’est plus … j’avoue avoir, à ce moment là, traversé des moments difficiles, surtout dans la dualité des sentiments que j’ai éprouvé … Admettre que j’avais malgré tout du chagrin m’a aussi aidé à avancer. Aujourd’hui je suis en paix avec moi-même parce que je suis allée au bout de ma démarche en renonçant à sa succession.
Bon sinon t’en es ou de ton blog culinaire ?
Il a fait sa vie à sa manière, tu fais la tienne maintenant.
Pas de jugement, seulement un commentaire pour dire que j’ai pris le même chemin il y a quelques mois, que ça fait un bien fou, que ça me paraît tout sauf lâche de prendre une décision telle que celle-ci et que surtout, quand parfois j’y repense, je relis ce texte sur le pardon : http://vergiberation.blogspot.com/2009/08/le-pardon.html, ça me calme tout de suite et ça me conforte dans ma détermination 😉
Merci !!!
Tu sais bien que ce que moi je te dirai, façon Tom Hanks, c’est « c’est tout c’que j’ai à dire là-dessus » … et la comparaison avec ce film magnifique vaut aussi pour l’aspect vaguement maladif de la question …
Alors non, moi là-dessus, la seule chose que je te dirai c’est : « comment ça, un truc qui tu troue le cul ??? mais de quoi tu causes ? pourquoi y a pas de photos ???? » Bizzzzzzzzzzz :laugh_tb:
@Benjamin : Merci pour ce lien !
Ai trouvé la publicité d’un produit en vitrine du magasin bio … Chondrostéo ….ça peut peut-être guérir « le roidetrefle » de toute affection physique ou morale ( taper chondrostéo sur google)
Ayé, j’ai visionné la finale du diner! :dunce_tb:
Si ça peut te consoler, tu n’es vraiment pas le seul dans cette situation. Si tu lis un peu l’anglais, va voir cet article du NYtimes, et surtout va voir le forum dans Health, il y a au moins une centaine de témoignages de gens qui racontent comment et pourquoi ils ont coupé les ponts avec leurs parents.
http://well.blogs.nytimes.com/2009/10/20/divorcing-your-parents/?apage=8#comments
Moi à la lecture de tes premiers billets sur le sujet, ça m’a fait du bien de constater que je n’étais pas le seul à vivre cette situation. De ton côté, ça a toujours l’air douloureux, par contre… :wub_tb: