Cela m’arrache la gueule de l’avouer, mais je commence à me sentir à l’aise et surtout à apprécier mon nouveau quartier. Le canal Saint-Martin se révèle être un lieu de villégiature très chaleureux et surtout très vivant. Les bobos parisiens, dont je fais fièrement partie, y trouvent leur bonheur au quotidien. Entre les épiceries bio, les boutiques de décorations, les cafés branchouilles et la multitude de magasins très commerce équitable, tout est réuni pour attirer et fidéliser cette population de consommateurs. Sans compter sur le charme de l’hôtel du nord, des écluses et des petits parcs, ou de la possibilité de pique-niquer le soir sur le bord des berges en été. Les amateurs de course à pied sont également gâtés. Le parcours longeant le canal entre République et la Villette est idéal pour se décrasser les poumons. Cerise sur le gâteau, la place de la République est desservie par de nombreuses lignes de métro et de bus, et seules dix petites minutes de marche sont nécessaires pour rejoindre le centre de Paris. Dans mon quartier, les femmes et les pédés sont des princesses, on ne paye pas d’impôts, tout le monde est heureux, on marche sur l’eau, les oiseaux étendent le linge et le soleil brille en permanence. Fin de l’encart sponsorisé par la mairie du dixième arrondissement.
Si les habitants de ma rue se sentent naturellement concernés par la crise financière, la faim dans le monde et par la guerre au Darfour (oui, la guerre c’est mal), il viennent de se mobiliser pour une cause bien plus importante encore: la propreté. Ainsi notre rue est-elle devenue une véritable patinoire à merde. Les propriétaires des rues voisines semblent avoir choisi la rue Lucien Sampaix comme dévidoir à étrons. Tout comme les zizis, on en trouve des grands, des gros, des longs, des verts, des gluants, des noirs, des crémeux ou des secs. Les commerçants, à l’image de bob le propriétaire du « Juice bar », commencent à en avoir ras-la-moule, font signer des pétitions et affichent des messages de protestation sur leurs devantures. : Non aux cacas sauvages, boutons les déjections canines. Les personnes âgées mènent même l’enquête. Nous savons maintenant qui est le propriétaire du chien qui chie d’immondes bouses orange tous les matins devant notre porte cochère. Ses heures sont comptées.
Notre copropriété est toujours aussi rock n’roll. Le Monsieur Dame du quatrième s’est calmé et ne drague plus mon mari, les propriétaires du dessus continuent de baiser comme des lapins et le locataire d’en face de cultiver son cancer du poumon. Ma chaudasse de voisine ne m’a plus montré ses nichons, mais adore parler de la pluie et du beau temps avec moi en me caressant la main. Petit à petit, j’ai réussi à squatter la cour en ramenant de mon ancien immeuble les arbres que j’avais plantés avec amour. Enfin, je me suis découvert une nouvelle passion : regarder les voisins d’en face, et surtout le délicieux voisin qui passe son temps en caleçon et doté d’une sculpturale tablette de chocolat. En résumé, tout le monde communique avec tout le monde et semble s’apprécier. Nous nous réunissons même fréquemment les uns chez les autres. Il ya une raison à cela: l’adversité (ou comment une grosse tuile peut souder les copropriétaires les plus teigneux). Notre copropriété est constituée de trois bâtiments: (i) le bâtiment principal construit il y a plus de deux siècles, (ii) un second bâtiment, plus petit, qui était initialement une écurie, et enfin (iii) une petite maison construite dans la cour. Les propriétaires du petit bâtiment ont appris avec effroi qu’il fallait le sécuriser et certainement l’évacuer avant de réaliser de couteux travaux. Une infiltration d’eau sur une très longue durée, infiltration camouflée par le colocataire du rez-de-chaussée, aurait rongé la charpente qui soutient les deux étages de l’immeuble. Les poutres ressemblent maintenant à des éponges et abritent une colonie de champignons de la mort qui tue.
En résumé, tout le monde est en procès avec tout le monde, les experts passent leur temps à expertiser les expertises, et l’immeuble, tel la tour de Pise, s’affaisse de jour en jour. Lundi dernier, les heureux propriétaires ont appris que l’ancien propriétaire responsable était certainement non solvable et que les victimes de l’odieux margoulin allaient devoir sortir de leurs poches l’argent nécessaire aux travaux, c’est à dire entre 300 et 500 000 euros (à ventiler sur 4 propriétaires). Si la copropriété est solidaire pour les frais d’avocats, tout se transforme en « demerden sie sich » lorsqu’il s’agit de travaux. Inutile de préciser que Snooze et moi même, endettés pour encore 18 ans, sommes égoïstement rassurés de ne pas avoir à régler la note. Prochaine étape: le ravalement de la cour, uniquement lorsque les gros travaux du bâtiment écurie auront été réalisés. Et ce n’est pas pour demain. :bye_tb:
Morale de l’histoire: Être locataire a finalement du bon. C’est surtout bon pour le cœur.
Dans ton inventaire, tu as oublié la grosse bouse! Celle de la tourista, de la chiasse quoi. Mais il est vrai qu’on n’a jamais vu de zizi sous cette forme. En tous cas pas moi :clap_tb:
Bobo !!!
oui, je suis bien d’accord avec toi, quand on a un propriétaire acceptable…
Curieusement à Londres on a pas trop de problèmes de déjections canines dans les rues… Mais dans les parcs je suis toujours terrorisé d’observer que le plus petit des caniches est capable de démouler des troncs de baobab, je me demande ce qu’ils foutent dans la bouffe pour chien ici :wub_tb:
Désormais j’éviterai la lecture de tes billets au petit dèj’….0_°…..
Je savais que ça viendrait un jour, et que tu finirais par aimer le quartier, même si ta rue n’est effectivement pas ma préférée.
A l’heure du thé ce n’est pas mal du tout non plus la decription des déjections dans ta rue !
Oula, ces histoires de travaux, je les plains tes copro.
Lol, ta copro c’est pire que dallas 😀
Sinon c’est vrai que les alentour du canal sont sympathique, Matoo m’y a amené manger une fois.
J’ai deux amours Snooze et Paris…..
Je ne suis pas d’accord sur les avantages d’être locataire. Les locataires ne connaissent pas les joies des assemblées de copropriétaires. Ce sont des réunions où la bêtise humaine se révèle pleinement, où les ravages de l’alcoolisme, des haleines fétides et de la sénilité sortent au grand jour, où la cupidité, l’ignorance, la désorganisation et l’imbécilité valsent ensemble une infernale et fascinante farandole. Des moments rares où l’on peut être pris de vertige devant l’étendue et la profondeur de la connerie de nos contemporains. C’est vraiment trop dommage de rater ça.
@ MarcelD: et la grosse bouse laissée sur mon profile FB, hein? :blink_tb:
@ Fanette: ouiii, c’est moi! :jittery_tb:
@ Saperli: Et c’est assez rare. :happy_tb:
@ Fab: De la Marmite! :bye_tb:
@ Saa: Billet du soir, espoir. :thumbup_tb:
@ Philoo: Nous allons la transformer la rue, juste une question de temps! :furious_tb:
@ Fauvette: Et comme nous avons de la chance de ne pas être à leur place… :clap_tb:
@ kitt67: Et il nous a quitté depuis…pour pas très loin. :jittery_tb:
@ Christophe: Paris et Snooze! :king_tb:
@ Sameplayer: J’ai toujours envie d’en faire un billet. Oui, ces réunions sont rock n roll. :bye_tb:
Tout à fait d’accord avec ta conclusion… Je me le dis tous les jours!
Pour le quartier, j’étais sûr que tu t’y ferais… Le canal à cette saison, c’est quand même un plus :clap_tb: